Avec une dictature brésilienne comme toile de fond, The Kiss of the Spider Woman, adapté du roman du même nom de l’auteur argentin Manuel Puig, met en scène la relation de deux prisonniers partageant une même cellule.
Molina (William Hurt) est emprisonné à cause de son homosexualité (la raison officielle étant un détournement de mineur). Personnage principal, il occupe la majorité de l’espace dès la première scène : malgré l’environnement gris de la prison, il reproduit autour de lui une atmosphère kitsch s’inspirant de l’Europe des années 30-40, atmosphère où évolue Leni, l’héroïne d’un film d’espionnage servant la propagande nazie. Afin de tromper l’ennui, Molina raconte l’histoire de Leni (Sonia Braga) à Valentin (Raúl Juliá), son compagnon de cellule, l’entrainant ainsi dans son monde.
Dès le début, le film de Babenco fait le parallèle entre l’histoire de Leni et de Molina : les personnages fonctionnent comme un miroir l’un de l’autre. Lorsque Molina raconte l’histoire de Leni, il reproduit ses mouvements, ses attitudes et va parfois même jusqu’à copier ses vêtements. L’alternance de scènes où il joue le rôle de cette femme et de scènes du film nazi telles que se les représentent les deux prisonniers accentue le lien entre Molina et Leni.
Valentin, quant à lui, est un prisonnier politique : il fait partie d’un groupe révolutionnaire marxiste. Ce personnage semble de premier abord secondaire, mais il participe pleinement aux fictions de Molina. La représentation du film de Leni est le fruit de l’imagination des deux protagonistes : si Molina apporte l’ambiance, le contexte, l’histoire, Valentin prête à Leni les traits de Marta, son ex-fiancée. Au fur et à mesure des discussions, une certaine intimité se construit entre les deux hommes, permettant de voir à travers leurs masques et d’approfondir les personnages. Chacun remet en questions ses préjugés par rapport à l’autre et apprend à en apprécier les qualités humaines.
La question de l’homosexualité et, plus globalement, de la correspondance aux normes de la masculinité sont traitées ici au travers de l’opposition entre Molina et Valentin d’une part, et d’autre part, grâce à l’identification de Molina à Leni. Alors que Molina adopte fréquemment des attitudes très typiquement féminines, Valentin semble au début être l’archétype de l’homme : peu bavard, parfois brusque, très discret sur ses sentiments et ses émotions. Cependant, il s’ouvre peu à peu à Molina, lui parle de son passé et de ses origines, et dévoile par là une certaine sensibilité. Molina, quant à lui, parle de la stigmatisation qu’il subit à cause de son orientation sexuelle. Il faut par ailleurs noter qu’en 1985, ce film est l’un des premiers à aborder la question de l’homosexualité de manière aussi explicite.
Grâce à sa mise en scène et au jeu remarquable de William Hurt interprétant Molina, Hector Babenco parvient à faire oublier au spectateur que la majorité de l’action se déroule dans une cellule de prison. On est séduit par la complexité des personnages et l’ambiance, et c’est ce que l’on retient de ce film.
Hector Babenco. The Kiss of the Spider Woman. Embrafilme. 1985.
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