Alors que les films d’animation et les contes de notre enfance nous ont habitués à voir des personnages entièrement bons affronter des antagonistes totalement mauvais, Maléfique propose au spectateur de découvrir l’autre face d’un des contes les plus célèbres, La Belle au Bois dormant. En effet, les contes populaires subissent maintes et maintes réécritures et celui de La Belle au bois dormant n’échappe pas à la règle. Parmi les versions les plus célèbres nous connaissons celle de Charles Perrault et celle des frères Grimm mais également le film d’animation créé par les studios Disney ou encore le ballet de Piotr Ilitch Tchaïkovski. Maléfique, au final, n’est qu’une nouvelle réécriture de ce conte mais où le pari a été fait de raconter l’histoire (« véritable » comme cela est énoncé dans le film) d’un autre point de vue.
Dans un monde qui n’est plus aussi manichéen que dans les contes, Maléfique (Angelina Jolie) est autant une sorcière qu’un héros. Ce changement de perspective est annoncé dès le slogan Disney au début du film où le château de la Belle au Bois Dormant n’est pas vu sous l’angle habituel mais sous celui dont le voit Maléfique depuis chez elle.
La jeune, innocente et ailée Maléfique vit dans la Lande au milieu d’autres fées alors que les hommes vivent dans le monde d’à côté, au milieu de leurs ambitions et de leur vanité. Un jour, elle rencontre Stefan (Sharlto Copley) qu’elle commence à aimer. Mais trahie et traquée par les hommes et dépourvue de ses ailes, Maléfique devient vraiment « maléfique ». Ainsi, c’est la perte de l’amour et la cruauté des hommes qui créent en quelque sorte la malveillance de la sorcière. Sa « méchanceté » est donc expliquée et motivée dans ce film. Cependant, malgré la soif de vengeance, le film laisse transparaitre la compassion, les regrets, la douleur et les attentes de la fée-sorcière. Se prenant d’amitié pour Aurore, Maléfique devient aussi à la fois celle qui protège et celle dont on doit protéger. Ainsi, Maléfique possède bien plus de facettes que le conte de la Belle au Bois dormant le laissait paraitre.
L’histoire initiale du conte est non seulement montrée sous un autre angle mais des changements ont été faits au sein même de la narration. Ainsi, c’est Maléfique elle-même qui énonce la close du baiser véritable qui réveillera Aurore. L’enchantement prend alors un tout autre sens que dans le conte de la Belle au Bois dormant. La forêt d’épine, quant à elle, devient celle qui sépare la sorcière du reste du monde. Maléfique a aussi un acolyte et serviteur, Diavall (Sam Riley), et côtoie Aurore (Elle Fanning). Elle n’est donc plus aussi seule.
Le film est à la fois prenant sous son nouvel angle mais propose aussi des passages et des répliques remplis d’humour ainsi que des moments d’émotion qui font que le spectateur s’attache à l’une des méchantes les plus célèbres de Disney et de la littérature. La musique, les costumes, les décors et les effets spéciaux participent aussi de manière particulièrement intéressante à montrer les deux faces de Maléfique, la différence entre son monde et celui des hommes ainsi qu’entre le passé et le présent.
Cependant, alors que, comme nous l’avons dit, nous nous attendions à un monde moins manichéen et, tandis que Maléfique devient un personnage plus nuancé, la balance penche dans l’autre sens. Cette fois-ci ce sont les hommes qui sont montrés comme particulièrement mauvais et poussant la gentille Maléfique à devenir cruelle, alors que les autres fées sont dépeintes comme étant totalement sottes et ridicules. Quand est-ce que le juste équilibre sera-t-il trouvé dans un film?
A noter aussi la belle prestation d’Angelina Jolie ainsi que le travail particulièrement remarquable du réalisateur et directeur de la photographie quant au cadrage et à la lumière du film.
Pour conclure: les 1h30 du film passent vite et ce dernier est à conseiller si vous aimez voir des adaptations de vos contes préférés ou si vous êtes (ou êtes restés) un enfant dans l’âme.
Robert Stromberg. Maléfique. Walt Disney Pictures. 2014.
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