C’est curieux tout de même que toutes ces années-là, au café, restent pour moi mes meilleurs souvenirs, alors que tout autour de nous ce n’était que misère. Oh, nous n’étions pas privilégiés, loin de là, on a lutté comme les autres, mais nous étions heureux; il y avait tant de joie et de chaleur humaine dans cette maison.
Alors qu’Evelyn, femme dépressive entre deux âges, se sent obligée de venir tous les dimanches accompagner son mari à la maison de retraite de Rose Terrace pour visiter la mère de ce dernier, elle y rencontre la pimpante octogénaire Ninny Threadgoode. Au fil des souvenirs de la retraitée, Evelyn se prendra d’affection pour la famille de cette dernière et de tous les personnages qui ont évolué, il y a des années de cela, à Whistle Stop, petite ville en Alabama. Le café que tenaient Idgie Threadgoode et Ruth Jamison, le Whistle Stop Café, deviendra en particulier un élément clé des histoires de Ninny. La découverte de ces souvenirs permettra à Evelyn de réapprécier la vie et de prendre un nouveau départ.
Le roman mélange les discussions d’Evelyn et de Ninny ainsi que les événements de 1986, année où elles se rencontrent, des extraits de la gazette de Weems, le bulletin hebdomadaire de Whistle Stop qui était tenu à l’époque de Ninny, les nouvelles de Birmingham et les plongées au sein des années 1930-1940 (surtout) qui présentent directement au lecteur les événements dont parle Ninny. Ce mélange peut paraître un peu brouillon au tout début et il faut quelques pages pour s’y retrouver dans cette manière de narrer. Même si à cause de ces divisions le démarrage du roman semble un peu plus long, cette manière d’écrire permet au lecteur d’accéder à certaines informations, alors que Ninny ignore le fin mot de certaines histoires et dis à Evelyn qu’elles n’en sauront jamais rien. Tandis que certaines révélations sont attendues, d’autres surprennent plus le lecteur. Ainsi, une simple chronique sur la vie d’une petite ville de l’Alabama est parfois teintée d’allures de mystère tandis qu’au fil des pages nous découvrons quel destin la fortune (ou l’écrivaine) a réservé à tel ou tel personnage. Au final, même s’il peut paraître morcelé, le roman est bien rythmé. Ces différents changements entre les voix narratives et différentes manières de raconter les évènements et les souvenirs offre un monde coloré et diversifié dont le lecteur a les images devant les yeux. Cependant, vu que le roman permet au lecteur d’observer tour à tour plus précisément divers personnages, on se demande pourquoi certains d’entre eux n’ont pas partagé leurs pensées avec nous, permettant un autre focus narratif. D’autres passages, comme celui sur la haine d’Evelyn et son personnage imaginaire de Towanda sont, quant à eux, plutôt étranges et presque déplacés dans ce roman.
Même si personnellement je ne me suis pas attachée aux personnages, il est parfaitement concevable que d’autres lecteurs se prendront d’affection pour certains d’entre eux. En effet, ces personnages intéressants sont vifs, pleins d’imagination, parfois émouvants et même en un certain sens héroïques dans les choix qu’ils font pour protéger leur bonheur. Alors que les personnages s’expriment avec humour et malice, le lecteur se sent envahi de bonne humeur. Cependant, même si le livre présente de francs passages à rire, il en propose aussi au lecteur qui feront réfléchir et d’autres qui sont plutôt crus et même effrayants pour l’imagination. Finalement, alors que tout dans la vie a une fin, le lecteur découvre comment tout continue à exister au fil des souvenirs et des mots. Les personnages n’ont pas eu une vie facile entre préjugés, maladies, accidents, drames… mais ont accueilli leur destinée avec le sourire. Certains lecteurs, à l’instar d’Evelyn, pourront peut-être trouver du réconfort dans ce roman à travers l’acceptation si simple de leur vie par les personnages.
Mine de rien et naturellement, l’auteur introduit dans cette simple chronique, certains thèmes et questions complexes comme la différence entre les Blancs et les Noirs au Sud des Etats-Unis au début du XXème siècle, le racisme, le handicap, la maladie, la présence de Dieu. D’autres thèmes semblent être abordés mais le lecteur n’a pas vraiment la réponse quant à la véritable nature de certaines relations entre les personnages. Cependant, le roman paraît un petit peu daté pour un lecteur d’aujourd’hui et nous pouvons nous demander si cette œuvre est intemporelle. Au final, même si certaines idées reçues ou jugements hâtifs se retrouvent au détour d’une phrase, des figures de styles telles des comparaisons ou encore des jeux de mots sont particulièrement bien trouvés par l’écrivaine.
Petit plus: souvent, en lisant un livre nous avons bien envie de nous faire à manger ce que dégustent les personnages et, chose sympathique, à la fin de ce roman, le lecteur a aussi droit à quelques bonnes recettes qui ont parsemé les pages du roman, afin de ne plus seulement avoir les images du Whistle Stop Café dans la tête mais aussi sentir les bonnes odeurs qui flottaient autour des personnages dans leur quotidien et de croquer dans ce qui délectait leurs papilles. Merci « Sipsey »! Cependant, pourquoi le titre français (le titre anglais est Fried Green Tomatoes at the Whistle Stop Café) se base seulement sur les beignets de tomates vertes qui au final n’occupent pas vraiment de place particulièrement importante au sein du livre?
Bilan: quelques phrases à se rappeler, quelques blagues à retenir, quelques leçons de vie à appliquer sans pourtant particulièrement s’attarder sur le roman.
Fannie Flagg. Beignets de tomates vertes. J’ai lu. 2009.
Acheter le livre:
RT @filmsdespages: Beignets de tomates vertes : un petit tour à Whistle Stop
http://t.co/iqMwhgAHIx
[…] Le roman parle de deux femmes : Evelyn, femme dépressive entre deux âges, et l’octogénaire Ninny Threadgoode pleine de joie face à la vie. Cette dernière emmène Evelyn, au fil de ses souvenirs, vers Whistle Stop, vers le Whistle Stop Café qui était tenu par ses belle-soeurs – les énergiques Idgie Threadgoode et Ruth Jamison – et vers les bons beignets de tomates vertes qui y étaient préparés par celle qui au long des années est devenue une amie chère de Ninny, Sipsey. Vous pouvez découvrir la critique d’Aux films des pages à propos de ce livre en cliquant sur…. […]